Dans cet article
La plupart des backpackers en Australie travaillent en ferme durant leur PVT. Que ce soit pour valider un 2eme PVT ou pour gagner de l’argent afin de se payer un road trip. Le travail en ferme est une opportunité souvent privilégiée. Cependant, les arnaques sont fréquentes, notamment avec les « contractors » (sous-contractant). Des pratiques encore plus sombres font aujourd’hui surface. ABC news a rencontré Elin* (son nom a été changé), Raena ou encore Jenna. Ce sont des backpackeuses qui ont vécu des situations de harcèlement pendant leurs jours de ferme. Témoignages sur l’envers du décor des fermes en Australie.
Cet article est basé sur « Backpacker Farm workers speak of wage exploitation » qui est paru sur le site d’ABC, le 16 septembre 2020.
Le travail en ferme, un business important en Australie
Chaque année, des dizaines de milliers de jeunes backpackers travaillent dans des fermes australiennes. Ils deviennent de la main d’œuvre bon marché. « Fruit picking » ou « fruit packaging » sont des termes régulièrement recherchés dans les groupes Facebook. Les jeunes backpackers en PVT souhaitant généralement renouveler leur visa.
Depuis des années, le Gouvernement assure au public qu’il prend des mesures contre l’exploitation systématique des jeunes voyageurs. Cependant, de plus en plus d’histoires des backpackers font surface et démontrent le contraire.
Pendant que la plupart des Australiens sont payés à l’heure, plusieurs backpackers employés dans le secteur de l’agriculture sont quant à eux payés au rendement. Cela signifie que leur salaire dépend de leurs récoltes, de leurs plantations ou de la vitesse de packaging. Des arnaques peuvent ainsi être mises en place et certains fermiers sont particulièrement malhonnêtes. On a déjà une liste de fermes qui ont été déconseillées par les backpackeurs à retrouver ici.
Le témoignage d’Elin
Après deux mois de travail dans une ferme, Elin* a seulement été payée 70$.
Alors comment est-ce possible de travailler pendant deux mois et n’obtenir que 70$ ?
Elin* raconte son histoire anonymement, sous un faux nom, par peur des représailles venant des personnes pour qui elle a travaillé.
Lorsqu’elle travaillait dans une exploitation de fraises régionale, dans le Queensland, Elin* raconte qu’elle n’était pas informée en amont du salaire qu’elle allait toucher. Ses propres calculs ont démontré que son salaire atteignait seulement 2.50$ de l’heure.
Si elle a accepté de rester, c’était pour compléter ses 88 jours de travail en ferme. C’est un prérequis mis en place par le gouvernement fédéral pour les backpackers voulant renouveler leur PVT pour une seconde année.
« Nous sommes restés, tout en sachant que nous étions dans une mauvaise situation, qui plus est, sous-payés. » explique Elin.
Son travail en ferme avait été organisé par un sous-contractant employé par une entreprise de recrutement.
Ce contractor l’a fait rester dans une colocation pour un loyer hebdomadaire de 125$, alors qu’il ne lui a attribué que 16 jours de travail. De plus, certains jours, elle ne travaillait que trois heures. Pour compléter son salaire, le contractor a commencé à lui proposer des deals pour le moins étranges.
« On nous demandait de trouver uniquement des personnes d’origine asiatique sur internet. Lorsque nous trouvions un travailleur asiatique, nous gagnions 100$ »
Ce processus de recrutement devait se faire via les groupes Facebook, très nombreux sur l’Australie.
Elin* affirme avoir refusé cette proposition de complément de salaire. Pour elle, le racisme et le ridicule de l’offre ne valait pas une prime supplémentaire. Cependant, certains backpackers ont cédé en postant une annonce sur les réseaux. C’est comme cela qu’ABC a découvert ces pratiques peu reluisantes.
Mais ce n’est pas tout, Elin* ajoute que durant son expérience, le sous-contractant lui a fait des avances sexuelles. De plus, si elle acceptait de vivre secrètement sur sa propriété, il l’aurait payée 500$ par semaine.
ABC n’a pas réussi à contacter le sous-contractant. Toutefois, le réseau de télévision a pu parler au propriétaire de l’entreprise de recrutement, qui a nié toutes les accusations d’Elin*. Il a affirmé que le commerce était régulièrement contrôlé. Il explique également que ses travailleurs les plus rapides plantaient plus de mille fraises en une heure. Par conséquent, le faible salaire d’Elin* devait signifier « qu’elle ne plantait que soixante fraises par heure. »
De plus, il déclare que son entreprise ne propose pas de logement, et qu’il n’a jamais eu de « relation personnelle avec ses employés »
Néanmoins, Elin s’en tient à son histoire. Elle a fait deux rapports anonymes à l’agence publique « Fair Work Ombudsman » qui régule et surveille la conformité sociale sur le lieu de travail.
« J’espère qu’ils pourront arrêter les personnes qui en exploitent d’autres grâce à mon témoignage » conclut-elle.
La FWO n’a pas fait de commentaire sur ce cas individuel.
Les témoignages de Raena & Jenna
Le harcèlement sexuel envers les femmes est également pointé du doigt. Raena a vécu cette situation dès son premier jour.
« Il a mis sa main sur ma cuisse et il m’a dit que j’étais son type de backpackeuse ».
Le premier jour où Raena devait travailler, il lui a proposé d’aller à la plage avec elle plutôt que d’aller dans la ferme. « Je lui ai dit non mais il m’a dit que du moment qu’il me payait, il pouvait faire ce qu’il voulait de moi » explique Raena. Le fermier prenait des photos régulièrement de Raena et lui faisait des remarques sur son physique à longueur de journée. Mais un jour, une nouvelle backpackeuse est arrivée et il a porté son attention sur cette nouvelle venue.
Jenna, qui a travaillé dans la même ferme, confirme les propos de Raena. Elle explique qu’il venait régulièrement lui faire des remarques déplacées ou encore la toucher sans son consentement. «C’est difficile de parler quand vous êtes coincée dans un endroit.»
L’exploitation des backpackers en chiffres
L’exploitation des backpackers en Australie par les propriétaires de ferme est un problème d’ampleur national aujourd’hui. Malgré de nombreux témoignages et plus de 1,647 plaintes déposées par la main d’œuvre migrante courant 2020, le gouvernement fédéral australien ne semble pas réagir.
Si tu es victime
Si tu es victime d’abus de la part de votre employeur, n’hésite pas à en parler le plus rapidement possible. Afin de te protéger, mais également de protéger les futurs backpackers.
De plus, le FWO peut t’aider. N’hésite pas à les contacter pour faire valoir vos droits. Ils ont plusieurs services selon les besoins, à retrouver ici : https://www.fairwork.gov.au/contact-us/call-us.
L’envers du décor des fermes en Australie n’est pas toujours rose, mais il est important de dénoncer ces pratiques malhonnêtes.
En attendant, prend soin de vous, fais attention à toi et kiffes ! L’Australie a quand même des côtés bien plus agréables que ces sombres histoires.